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Rude Roazhon
28 novembre 2007

LES PARAS SAUTENT SUR RENNES 1 : TEMOIGNAGE D'UN ENSEIGNANT.

C'est le titre d'un mauvais film que je cite de mémoire... Ça illustre aussi assez bien le courrier que je viens d'envoyer à mon directeur d'UFR :

Cher G., bonjour.


Je t'écris ce courrier, car tu es directeur de l'UFR de Mathématiques, et que j'y enseigne. Ce matin, comme tous les mardis, j'arrive un peu avant 8 h au bâtiment 2 dans lequel se trouve la salle qui m'est attribuée pour mes travaux dirigés d'algèbre linéaire.

Je trouve la porte close, j'en essaie d'autres qui sont dans la même situation. Sur l'une, je trouve un panneau indiquant qu'il faut passer par le bâtiment 1. Je m'y rends et me rends compte que là aussi, toutes les portes sont fermées de l'intérieur, sauf une petite porte entrebâillée permettant de converser avec notre vice-président, lui même accompagné d'un acolyte que je ne connais pas, mais à la stature nettement plus imposante.

Étant donné le brouhaha et la cohue due aux dizaines d'étudiants qui étaient postés devant cette porte, je ne suis pas sûr de rapporter fidèlement ce qui suit. J'ai demandé à monsieur M., R. de son prénom, s'il faisait vraiment entrer des étudiants dans un bâtiment dont toutes les portes sont fermées à clef au risque de ne pouvoir les évacuer en cas d'urgence. Je lui ai dit que cela me semblait illégal et que je ne pouvais assurer mon cours dans ces conditions. J'ai informé ceux de mes étudiants présents que je n'assurerai pas mon TD aujourd'hui. J'ai entendu R.M. dire qu'il allait ouvrir les portes... j'étais déjà sur le chemin du retour.

Ayant aperçu quelques paramilitaires dans l'enceinte du bâtiment, j'ai du dire que je ne pouvais, de toute façon, pas travailler dans ces conditions de militarisation. En retournant vers mon bâtiment de recherche, je me suis arrêté pour discuter avec quelques étudiants grévistes auxquels j'ai relaté l'incident. Ils étaient devant une porte close. Au bout d'un moment, deux barbouzes sont arrivés, rangers aux pieds, bombe lacrymogène à la ceinture, etc.  Je n'y connais pas grand-chose, mais ça rappelle un peu certains films américains. Ils ont ouvert la porte, ont descendu l'escalier, ont écarté les étudiants sans ménagement, ont brutalement jeté des tables, et tout cela en traitant les étudiants de haut. Je peux comprendre leur ressenti de devoir faire une besogne aussi sinistre quand d'autres ont la chance d'étudier.

Ils ont été rejoints par un autre type avec, il me semble, une matraque à la main, puis un autre encore et se sont retrouvés finalement à cinq ! Pour garder un escalier devant 5 étudiants et 3 étudiantes qui se demandaient dans quel mauvais scénario ils étaient tombés... Je pense ne jamais avoir vu ça sur un campus : un escalier tenu par des forces spéciales d'intervention. Devant la placidité des étudiants, c'en était surréaliste. Un collègue qui voulait entrer a dû montrer patte blanche pour pouvoir entrer. La porte était ouverte, mais virtuellement fermée... les étudiants et moi-même sommes remontés vers le nord du campus.


Je te demande, mon cher G., d'intervenir pour que le vice-président en charge de notre campus nous fasse grâce de l'expression de son délire sécuritaire paranoïaque. D'une part, ce qu'il fait est totalement illégal et dangereux. D'autre part, en mettant face à des étudiants pacifiques, ses hommes de main pour les impressionner, il risque surtout de radicaliser leur mouvement et de les entraîner vers une attitude violente qu'ils n'auraient même pas imaginée avant.


Amitiés,


Bernard.


PS. Tu peux diffuser librement ce courrier et je vais moi-même en envoyer une copie aux collègues de l'UFR.

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